jeudi 22 mars 2012

Des bigarreaux
"Un merle noir, oxydé de vert et de violet, piquait les cerises, buvait le jus, déchiquetait la chair rosée...
- Qu'il est beau!...Chuchotait ma mère. Et tu vois comme il se sert de sa patte? Et tu vois les mouvements de sa tête et cette arrogance? Et ce tour de bec pour vider le noyau? Et remarque bien qu'il n'attrape que les plus mûres...
- Mais, maman, l'épouvantail...
- Chut!...L'épouvantail ne le gêne pas...
- Mais, maman, les cerises!...
Ma mère ramena sur la terre ses yeux couleur de pluie:
- Les cerises?...Ah! Oui, les cerises...

Le merle était parti, gavé, et l'épouvantail hochait au vent son gibus vide."  

COLETTE
"Sido"  

Fraises sauvages...

Fraises sauvages....

"Le vent se meurt sous les allées couvertes, où l’air se balance à peine, lourd, musqué…Une vague molle de parfum guide les pas vers la fraise sauvage, ronde comme une perle, qui mûrit ici en secret, noircit, tremble et tombe, dissoute lentement en suave pourriture framboisée dont l’arôme se mêle à celui d’un chèvrefeuille verdâtre, poissé de miel, à celui d’une ronde de champignons blancs"…
COLETTE
« Sido-Les vrilles de la vigne »

Et oui! Je le sais bien!
Je n'emporterai rien,
Pas même l'ombre d'un nuage.
Mais qu'elle est belle, dans ma main,
Cette fraise sauvage!
Maurice Carême